Conseils légaux

Conseils légaux

Que vous soyez un-e manifestant-e pacifiste, habitué-e des actions, journaliste ou encore street-médic, le risque d’interpellation existe toujours. Il est donc important de prendre ses précautions en amont. Renseignez-vous sur les avocat.es disponibles (le nom suffit), notamment auprès des réseaux d’entraide légale. Renseignez vous aussi sur le cadre légal dans lequel vous allez évoluer, comme le statut légal d’une manifestation ou les périmètres interdits par exemple. Prévenez aussi vos proches que vous vous rendez en manifestation, au cas où vous auriez besoin d’une aide extérieure. De nombreuses brochures existent en ligne[1], et cinq minutes de lecture peuvent potentiellement vous faire éviter plusieurs années de prison.

Se préparer avant une manifestation

Comme évoqué dans les Conseils préliminaires, la première chose est de se renseigner via les réseaux sociaux, canaux officiels et vos contacts sur le contexte (notamment légal) de la manifestation : légalité du rassemblement, zones interdites, annonces sur le dispositif de sécurité… Et cetera. En plus de cela, renseignez-vous sur le cadre légal du matériel et des actions que vous pensez entreprendre. Par exemple :

  • se masquer le visage (y compris dans un but festif) est généralement illégal, même si la jurisprudence est vague ;
  • il est évidemment interdit d’emmener des objets considérés comme des armes comme des couteaux, ou des projectiles en manifestation : si vous le faites, préparez-vous à un contrôle d’identité, une saisie voire une garde à vue pouvant aboutir à des poursuites, et prenez les dispositions nécessaires (voir plus bas) ;
  • les protections sont théoriquement interdites, même s’il existe une zone légale grise et une tolérance selon le contexte : encore une fois, préparez-vous en cas de saisie ou de poursuite ;
  • si le matériel « politique » (tract, pancarte, banderole, mégaphone, etc) n’est pas illégal selon son contenu, il existe un risque de saisie et de poursuites selon le contexte et les personnes qui les brandissent.

Pensez à nettoyer votre lieu d’habitation en prévision d’une perquisition : ne sachant pas ce qui peut vous être reproché, rangez les affiches politiques, bouquins et autres choses pouvant jouer en votre défaveur en lieu sûr.

Nettoyez également votre éventuel smartphone des applications (Facebook Messenger, Discord, Telegram) et messages (SMS et mails) non indispensables durant la manifestation. Évitez aussi les noms de contact pouvant indiquer une appartenance politique comme « Alice GJ », « Thomas (Antifa) » ou encore « Charlie Orga Manif ».

Récupérez et notez au feutre sur votre peau un contact d’urgence, comme une personne de confiance ou un collectif antirépression : évitez de le faire sur une zone trop visible afin d’éviter que la police vous cible comme potentielle menace à cause de cela. Préférez le mollet à l’avant-bras, qui est beaucoup plus susceptible d’être découvert.

L’Avocat-e

Renseignez-vous sur les avocat-es existant-es, notamments favorables à votre mouvement au cas où vous seriez interpellé-es, et mémorisez un de leurs noms (le numéro de téléphone n’est pas nécessaire). Pensez à informer vos camarades de l’avocat-e choisi-e afin de leur permettre de la-le joindre en cas d’interpellation pour obtenir des informations comme votre lieu de détention, et si possible prévenez l’avocat-e en question pour qu’il ou elle soit prêt-e à se déplacer rapidement en cas de Garde à Vue. Au delà de deux heures, un-e avocat-e commis-e d’office vous sera imposé-e dans le cas où vous avez (comme vous le devriez) demandé un-e avocat-e. Le cas échéant, votre avocat-e pourra néanmoins prendre le relai une fois sur place. Attention, les frais d’avocat-es restent applicables, mais ceux-ci peuvent être aussi bas que légalement possible si l’avocat-e est favorable à votre mouvement et peuvent éventuellement être couverts par un collectif anti-répression ; préférez donc avoir un-e avocat-e désigné-e et vous occupez de la question de l’argent après coup, plutôt que de risquer d’avoir une mauvaise défense.

La/Les personne(s) de confiance

En plus de cela, il est préférable d’avoir une personne de confiance, qui n’est pas en manifestation et de donner son contact à vos camarades. En plus de lui transmettre vos garanties de représentation, cette personne pourra s’occuper de récupérer vos affaires en cas d’incarcération, de nourrir vos animaux, prévenir votre famille et votre travail, etc.

Garanties de représentation

Dans le cas où le risque d’interpellation est grand (voire idéalement, dans tous les cas), il est conseillé de former une « pochette de représentativité » à passer à une personne extérieure à la manifestation, qui peut contenir les documents (ou une copie) suivants :

  • Pièce d’identité
  • Justificatif de domicile ou attestation d’hébergement
  • Fiches de paie
  • Certificat de scolarité (de moins de trois mois comme pour tout justificatif administratif)
  • Attestation CAF pour le RSA ou Pôle Emploi pour le chômage
  • Adhésion associative

Évitez néanmoins d’utiliser un bail qui pourrait faciliter le processus de perquisition [2].

Le but est de pouvoir prouver en cas de garde à vue que vous êtes « intégré-es à la société », installé-es dans votre ville et donc que vous vous présenterez à une convocation éventuelle, afin d’éviter une détention administrative en attente de jugement. Fournissez à la personne de confiance le contact de l’avocat-e choisi-e, et si possible un double de vos clefs de votre logement (ou contact pour), afin de pouvoir récupérer des effets personnels si vous êtes détenu-e après la garde à vue et nettoyer votre appartement au besoin. Cette pochette est à transmettre uniquement à l’avocat-e et non aux forces de l’ordre !

Les collectifs anti-répression (l’antirep)

Les collectifs antirépression ont pour but de faciliter la construction d’une défense collective contre la répression judiciaire. Cela passe généralement par un contact unique (téléphone et/ou mail) que tout le monde connait et peut contacter en cas d’interpellation. En ce sens, renseignez vous sur les collectifs anti-rep de votre ville ou région et notez son numéro sur votre peau au feutre (ou mieux encore, retenez le). Il y a un risque que ceci vous soit reproché comme prouvant une préméditation des actes qui vous sont reprochés, mais il est faible. Si vous finissez en Garde-à-vue, c’est le numéro à fournir à la police en guise de « proche » : celle-ci appelera le numéro (et non vous) pour signaler votre arrestation. Ainsi vos camarades pourront contacter le collectif pour savoir si vous êtes en Garde à Vue, dans quel commissariat, prévenir vos proches et éventuellement avoir plus d’infos sur les circonstances qui caractérisent votre Garde à Vue (par exemple, une comparution immédiate, mise en détention administrative, etc).

Pendant la manifestation

Le risque d’interpellation est le plus important en arrivant et en partant d’une manifestation : la vigilance reste donc de mise, même en dehors de la manifestation. Même lorsque l’on ne se livre pas à des actions répréhensibles, le risque d’être pris-e comme cible par les forces de l’ordre existe. Par exemple, si vous utilisez un mégaphone, vous serez sans doute considéré-es à tort comme leader du groupe et donc visé en cas de charge. Évitez aussi de pointer du doigt les forces de l’ordre, ce qui pourrait interprêté comme un appel à lynchage lors d’un procès. Évitez aussi de trop sortir votre portable : si la police prend une photo de vous avec votre téléphone portable en manifestation, cela pourra être utilisé pour justifier une fouille de celui-ci auprès d’un-e procureur-e.

Même si cela ne tient pas comme droit absolu, vous êtes théoriquement implicitement autorisé-es à être sur un rassemblement même non déclaré si les forces de l’ordre vous laissent passer un barrage ou après un contrôle d’identité, sinon cela tient du détournement de procédure. Il est donc possible de contester une éventuelle amende.

En cas d’arrestation

Une arrestation est généralement très rapide : tout se joue en quelques secondes. Si vous tentez de résister ou de fuir, c’est à vos risque et péril. Sachant que les arrestations sont à présent filmées et que votre résistance sera retenue contre vous, il peut être préférable de ne pas s’opposer. Comme pour tout, il s’agit de bien peser le pour et le contre. Ne tentez pas non plus de répondre aux provocations des forces de l’ordre : vous pourriez être poursuivit pour outrage et rébellion, alors que l’arrestation de base n’était peut-être pas justifiée. Ne partez néanmoins pas du principe que vous êtes innocent-es : si la police vous arrête, c’est qu’elle pense pouvoir vous inculper avec quelque chose (que cela soit réel ou non). Si vous pensez que personne ne voit votre arrestation, tentez d’être visible : ne criez pas de choses pouvant être prises comme une provocation, et criez plutôt votre nom ou celui de l’avocat que vous avez choisi afin de permettre à la foule de contacter le dispositif anti-répression. Si vous êtes sourd-es ou malentenant-es, le risque que la police prenne votre absence de réaction ou votre confusion comme un refus d’obtempérer existe : tentez de le signaler malgré la confusion.

Si vous voyez une personne se faire arrêter

Le premier réflexe si vous assistez à une arrestation est de filmer et d’inviter les personnes autours de vous à faire de même. Cela a pour but d’éviter que les forces de l’ordre profitent de la confusion ambiante pour se livrer à des abus, et être plusieurs à filmer les empêchent de vous arrêter également pour que vous interrompiez l’enregistrement.

Dans le chaos ambiant, la foule risque de crier de manière désordonnée, empêchant la communication avec la personne arrêtée : tentez de canaliser la foule, l’informer sur l’arrestation et invitez-la à crier à l’unisson le nom d’un avocat, « Je n’ai rien à déclarer » ou encore à demander à la personne de donner son nom.

Une fois l’arrestation finie, assurez vous de passer l’information à l’éventuel service d’ordre de la manifestation ainsi qu’au collectif anti-répression, et d’essayer de trouver le binôme ou à défaut les proches de la personne arrêtée.

Le dispositif légal

Le contrôle d’identité

Comme son nom l’indique, la police vous demandera lors d’un contrôle d’identité de fournir une preuve de votre identité, idéalement via un permis ou une carte d’identité ou le cas échéant via toute pièce administrative portant votre nom et votre photo. Le contrôle d’identité doit être annoncé (le fameux « Bonjour, contrôle d’identité » n’est donc pas juste une politesse). Il peut durer jusqu’à 4h et être poursuit dans un commissariat si les preuves fournies ne sont pas suffisantes aux yeux des forces de l’ordre : en ce sens, vous n’avez pas grand chose à gagner à ne pas avoir vos papiers sur vous, à moins que vous souhaitiez leur faire perdre volontairement du temps. Fuir durant un contrôle d’identité pourra vous être reproché légalement. Durant le contrôle d’identité, les flics peuvent être amenés à fouiller votre sac, photographier votre pièce d’identité (souvent avec leur téléphone personnel), comparer votre identité avec des fichiers comme le FPR (Fichier des Personnes Recherchées, incluant les fiches S, mais n’impliquant pas nécessairement des poursuites) ou le trombinoscope d’arrestation et enfin à vous questionner sur votre raison de votre présence. La seule information que vous êtes obligé-es à donner est votre identité, c’est à dire :

  • votre nom et prénom civil (et non d’usage) ;
  • votre date de naissance ;
  • votre lieu de résidence.

Il est généralement mal vu voire dans certains cas illégal de refuser explicitement de répondre à une question, mais vous avez le droit de garder le silence, notamment en disant « Je n’ai rien à déclarer ». À noter que cela peut néanmoins pousser les flics à vous embarquer au commissariat pour une identification plus poussée.

La nasse

La nasse consiste en l’encerclement massif d’une foule dans une zone déterminée, qui peut autant être une grande place dégagée qu’une ruelle. Il n’existe pas de définition légale claire de la nasse[3] et rentre donc généralement par défaut dans le cadre d’un contrôle d’identité, même si celle-ci n’est généralement pas annoncée : on se rend généralement compte au dernier moment que l’on est bloqué. Légalement, les forces de l’ordre sont censées être tenues de laisser une sortie, et de ne pas dépasser le délai légal d’un contrôle d’identité de quatre heures ; dans les faits, il n’est pas rares que cela ne soit pas respecté, et il n’est pas si rare de voir des nasses durer plus de sept heures. En ce sens, référez vous à la partie Conseils préliminaires pour vous préparer. Durant une nasse, la police peut-être amenée à effectuer des contrôles d’identité ou des fouilles, notamment à la sortie de celle-ci : à la suite de celui-ci, vous pouvez être maintenu dans le dispositif, transféré-es dans une autre nasse ou même emmené-es au commissariat. Dans une logique de défense collective, il est préférable de ne pas sortir individuellement pour se faire contrôler afin de permettre aux personnes n’ayant pas leurs papiers ou ayant du matériel répréhensible de sortir lorsque la nasse se termine.

Saisie de matérielle

Dans où les forces de l’ordre saisissent votre matériel, vous êtes théoriquement en droit de demander un papier l’attestant : cela permet de récupérer le matériel une fois la manifestation finie dans un commissariat (bien que vous ne sachiez souvent pas dans lequel), dans le cas ou celui-ci ne constitue pas une pièce à conviction dans un dossier en cours. Néanmoins, ce droit est bien souvent refusé et sa mise en défaut difficilement prouvable.

L’Arrestation

Une interpellation peut aller du simple contrôle d’identité au bout duquel vous serez libre, à une arrestation violente aboutissant à votre transfert au commissariat : comme évoqué précédemment, une arrestation violente peut se dérouler en moins de quelques secondes. Dans la mesure où tout ce que vous direz peut être retenu contre vous, gardez vous de répondre à toute question hormis concernant votre identité et préférez garder le silence.

Une arrestation peut se faire sous deux régimes : en flagrant délit, c’est à dire directement après/pendant ce qui vous est reproché, ou « en direct », c’est à dire jusqu’à huit jours après les faits, généralement à votre lieu de domicile ou bien (même si un préjudice moral peut exister et être remonté) sur votre lieu de travail ou d’étude.

La Garde à Vue

S’il s’est déjà vu que des Gardes à Vues soient faites en plein air (aboutissant souvent à des plaintes à L’IGPN, du fait du caractère limite de la procédure), une garde à vue se déroule généralement dans un commissariat et peut débuter dès votre arrestation sur place, à la suite d’un contrôle d’identité par exemple. Tout comme un contrôle d’identité, celle-ci doit vous être signifiée (« vous êtes désormais en garde à vue ») et doit être motivée par un chef d’accusation, même si celui-ci ne vous est pas nécessairement explicité. Une garde à vue dure 24h, extensible de 24h supplémentaires sans justification[4]. De fait, en comptant le contrôle d’identité, votre détention peut durer jusqu’à 52h, et peut déboucher sur une seconde garde à vue suite à l’ajout d’autres chefs d’accusation. S’agissant d’un dispositif ayant pour but de faire pression sur vous, le plus dur est donc de se blinder et de tenir psychologiquement ; tout est fait pour vous faire craquer, de l’ignorance volontairement maintenue de votre situation, au manque de repères temporels, en passant par des procédures humiliantes comme les fouilles.

L’arrivée

À la suite de votre arrestation, il est possible que vous soyez placé-es face à un Officier de Police Judiciaire (OPJ) directement sur place dans un camion équipé. Comme évoqué en haut, il est préférable de garde le silence ou dire n’avoir rien à déclarer, ce qui est équivalent : en revanche, refuser ou bien dire ne pas savoir n’est pas la même chose et peut être retenu contre vous.

Arrivé-es au commissariat, vous êtes placé-es en cellule de triage mixte : c’est le dernier moment où vous pourrez accéder à vos effets personnels que vous avez sur vous : profitez en pour par exemple enlever vos lunettes et mettre des lentilles, qui elles ne pourront vous être retirées sous couvert de danger, enlever vos piercings afin d’éviter qu’ils le fassent eux mêmes.

La fouille

Suite à cela, vous êtes fouillé-es : la police peut vous enlever énormément de choses, jusqu’à vous laisser en sous-vêtements bas (les soutiens-gorge étant souvent enlevés) et vêtement haut. La fouille ne fait pas à nu mais implique une palpation, faite par un officer du même genre perçu par la police, généralement basé sur votre identité civile : cela peut donc être dur pour les personnes transgenres. Vous seront aussi généralement retirés : ceintures, lacets voire chaussures, lunettes, portables, médicaments (avoir une copie d’ordonnance pour demander à y avoir accès), etc. enfin, un policier peut éventuellement vous demander si vous êtes « indisposé-es » : cela signifie qu’il vous demande si vous avez vos règles, et sera la seule occasion d’accéder à des protections hygiéniques.

Les transferts

Vous restez en garde à vue lorsque vous êtes déplacé-es dans les couloirs : ne répondez donc pas aux provocations éventuelles des policiers que vous croisez, qui peuvent potentiellement faire des commentaires sur votre corps ou vous faire croire que vous allez en avoir pour 10 ans en prison.

La cellule de détention

Dans l’ordre logique des choses, vous serez placé-es en cellule de détention : celle-ci n’a que rarement l’eau courante et du papier toilette; elle est donc souvent salle, bruyante et tout juste éclairée par le couloir. Durant ce temps, il est donc conseillé de s’occuper pour tenir, par exemple en faisant des exercices physiques, en chantant, dansant, et même en dormant. Tout ce qui permet de passer le temps est bon à prendre (dans la limite de la légalité), et vous perdrez rapidement la notion du temps. Ne faites pas les cow-boys, et prenez tout ce qui peut permettre de tenir le coup : acceptez la couverture et les repas, personne ne peut vous juger sur votre expérience personnelle de la garde à vue. Soyez prudent néanmoins aux couverts et aux verres, la police pouvant en profiter pour récupérer votre ADN et vos empreintes. Ils peuvent à tout moment vous sortir de la cellule pour vous refouiller ou vous réinterroger, souvent en vous réveillant pour accentuer la perte de repères temporels.

L’entretien

Au bout d’un moment, vous serez amené-es à être interrogé-es, généralement par un Officier de Police Judiciaire : ceux-ci possèdent souvent des formations, voire des études en psychologie, ne tentez donc pas d’être plus malin-e et restez humble. L’officier en face de vous sera souvent choisi afin d’augmenter leur chance d’obtenir des infos, soit en mettant quelqu’un vous ressemblant ou empathique (femme, possiblement enceinte, personne racisée, personne LGBTI, etc) qui tentera de vous mettre en confiance en cherchant des points communs, en vous proposant un café ou en prétendant être tout autant emmerdé-e que vous. Inversement, ils peuvent également mettre une personne antagoniste comme « un gros dur agressif ». La tactique du bon et du mauvais policier est souvent poussée à l’extrême.

Vos droits doivent vous être lus, mais tous ne le sont pas obligatoirement : il est donc important de les connaitre afin d’éviter de ne pas se laisser aller à la panique par le flou de la situation. Les voici :

  • droit de garder le silence, excepté pour votre identité : cela inclut aussi bien de se taire que de dire « Je n’ai rien à déclarer ». Même si c’est dur psychologiquement, usez-en absolument tout au long de la procédure, quitte à le dire en chantant pour aider la répétition suites aux multiples questions ;
  • faire des déclarations spontanées, y compris en déclamant des recettes de cuisine ou des chansons : attention, cela tend à énerver la police même si ce n’est pas répréhensibles, et évitez les déclarations et sujets politiques ;
  • demander à avoir un-e avocat-e : comme évoqué précédemment, vous pouvez exiger votre propre avocat-e en fournissant simplement son nom : la police tentera de vous faire croire que cela va allonger votre garde à vue ou que cela indique votre culpabilité, mais c’est absolument faux ;
  • contacter un proche, sur la base d’un numéro de téléphone. La police s’en tient en général à la famille et aux conjoint-es, donc n’hésitez pas à dire qu’il s’agit de votre concubin-e. C’est là que vous pouvez fournir le numéro de votre contact de confiance ou d’un collectif anti-répression. Attention néanmoins, vous ne passerez pas l’appel vous même : la police le fera pour vous, se présentera comme tel, indiquera votre détention en garde à vue et ne donne pas nécessairement le lieu. Évitez donc de faire appeler votre travail si cela peut jouer contre vous. Préférez donc demander à l’avance à votre contact de confiance de prévenir votre travail en signalant une maladie dans ce cas là ;
  • demander à voir un-e médecin : vous pouvez toutes les 24h demander à voir un-e médecin (généralement issu de SOS Médecins). Cela peut permettre d’avoir accès à des médicaments, à être examiné pour prouver plus tard d’éventuelles violences durant la garde à vue (attention, des blessures à l’arrivées en Garde à vue peuvent être considérées comme des blessures défensives et être retenues contre vous) ou plus simplement avoir un peu de contact humain. Attention néanmoins, ce que vous dites au médecin reste surveillé et il ou elle n’est pas nécessairement (voire rarement) votre allié-e.
  • Si vous n’êtes pas français-es, vous pouvez demander à contacter votre ambassade, et à avoir accès à un interprète : les entretiens doivent légalement être faits dans une langue que vous comprenez ;
  • idem si vous êtes sourd-es ou malentendant-es : vous avez le droit à un-e interprète LSF ;
  • Vous pouvez avoir un entretien privé de 30 minutes avec votre avocat-e toutes les 24h. Le contenu de cet entretien ne sera pas révélé à la police (sauf avocat-e hostile) : profitez en donc pour expliquer la situation à votre avocat-e : le plus il ou elle en sait, le mieux c’est, évitez donc de lui mentir ;

À la fin de l’entretien, il possible que le policier vous présente le Procès Verbal décrivant celui-ci : relisez le bien, refusez les reformulations (certaines d’entre elles pouvant être fourbes) et dans le doute refusez de la signer. vous pouvez barrer les marges et les blancs restants pour éviter qu’ils ne réimpriment des propos que vous n’avez pas tenus. Tout cela est nécessaire car une fois signé il est impossible de renier le contenu d’un PV, y compris sous prétexte de pression.

L’audience libre

Il est possible que les policiers vous proposent une audience « libre », c’est à dire sans avocat, similaire à une convocation. Attention, ce que vous dites durant cette audience libre est (contrairement à ce qui est affirmé parfois) toujours noté dans le procès verbal et donc utilisable contre vous. Dans le doute refusez. Précision cependant, vous êtes en droit de demander de vous même des audiences libres durant la garde à vue, et de dire ce que vous voulez durant celle-ci (y compris des chansons ou des recettes de cuisine) : cela peut potentiellement énerver les policiers.

Dans le doute, ne le signez pas : vous n’avez aucune obligation de signer quoi que ce soit.

Autres procédures

Il peut arriver que vous soyez emmené-es à un « tapissage » : la fameuse scène de reconnaissance devant une vitre sans teint. Les policiers peuvent également être amenés à vous prendre en photo avec tous les vêtements et accessoires trouvés sur vous ainsi que de vos tatouages afin de faciliter une comparaison avec des caméras de surveillances, y compris sur le long terme.

La jurisprudence est floue concernant le refus de prise d’empreintes digitales ou de prélévement d’ADN. Néanmoins, il peut être jouable de refuser dans le cas où les chefs d’accusation sont mineurs pour des questions de proportionnalité [5], et les éventuelles peines se limitent souvent à une amende qui peut être réglée avec l’aide des caisses de soutien/antirep.

Si vous êtes arrêté-es avec une personne proche de vous comme un-e concubin-e, la police le remarquera et s’en servira sans doute durant l’entretien, en évoquant par exemple sa fragilité face à la situation : bien souvent, ils mentent (et ce n’est pas illégal). De manière générale, il ne faut pas croire ce que vous disent les policie-ères, qui usent très souvent de mensonges pour vous faire craquer, quelques exemples : « votre mère va elle aussi être mise en Garde à Vue », « votre voiture brûle dehors » etc.

La sortie

Si vous êtes remis en liberté, police vous présentera le Procès Verbal, contenant toutes vos paroles et actes (idéalement donc, une longue liste de « Je n’ai rien à déclarer »). Les conseils concernant le PV d’entretien s’appliquent encore une fois ici : ne vous laissez pas avoir par l’impatience de sortir souvent encouragée par la police, et prenez cinq minutes pour le relire : c’est la dernière ligne droite, et il serait dommage de faire une erreur à ce moment là. Si la police parle d’un inscription au casier judiciaire, demandez à ce que cela soit noté dans l’extrait B1 ou B2 accessibles uniquement à l’armée et à la défense, et non en B3, accessible lui par l’employeur, surtout si vous comptez travailler avec des enfants. Il est possible à l’avenir de demander un déplacement voire un effacement de cette inscription, mais il s’agit d’une procédure laborieuse.

Si la police vous parle d’un passage en comparution immédiate, refusez absolument (même s’ils ne le présentent pas sous la forme d’un choix). Vous avez énormément plus de chance d’être condamné-es en comparution immédiate du faite de la fatigue et de l’absence de défense.

Sortir libre et en bon état psychologique d’une garde à vue est une victoire en soi : ne laissez personne vous reprocher la façon dont vous avez traversé cette épreuve.

La convocation

Une convocation au commissariat consiste en une invitation à une audition libre : ce n’est donc pas obligatoire. Assurez vous d’obtenir une trace écrite dans le cas où vous ne la recevez pas par courrier.

Les propos tenus durant une convocation ont une valeur légale et celle-ci peut d’ailleurs tout à fait déboucher sur une garde à vue.

C’est donc à vous de juger si le danger est plus de grand de s’y rendre (au risque de donner des informations sans le vouloir, sur soi ou sur d’autres, voire de finir en garde à vue) ou de ne pas s’y rendre (ce qui pourrait irriter la police, même si ce n’est pas en soit illégal).[6][7]

Les fiches de renseignement

Les informations concernant les fiches de renseignement sont très vagues : il existe des centaines de fichiers administratifs, beaucoup illégaux, et leurs liens sont souvent inconnus.

La plus connue est la fiche S (pour sureté de l’état), mais peu connaissent sa nature car rarement diffusée[8]. Il s’agit donc d’un dossier appartenant au Fichier des Personnes Recherchées, qui contrairement à ce que son nom indique n’implique pas nécessairement d’être rechercé-e pour arrestation. Cette fiche S, émise sur demande de la DGSI, contient une description de l’identité de la personne, la raison de cette fiche S et enfin la ou les conduites à tenir, comme par exemple une arrestation immédiate. Ces fiches peuvent concerner tout ce qu’il s’approche d’une menace pour l’état, allant des journalistes engagé-es politiquement jusqu’au soupçons de terrorismes. Il est très rare d’être signalé de l’existence de ces fiches pour sa propre personne sauf erreur de procédure. Une procédure de demande de retrait existe, aboutissant rarement. Néanmoins, il existe des signes flagrant permettant de le deviner, allant du contrôle avancé systématique à l’aéroport jusqu’à l’assignation à territoire[9].

Notes et références

  1. Les conseils en manif : édition 2019, par la Caisse de Solidarité de Lyon
  2. Les garanties de représentation, Défense Collective (archive)
  3. La « nasse », cette technique policière devenue routine des manifs mais au cadre légal incertain, Huffington Post
  4. ces 48h peuvent être encore étendue à 72h dans le cas d’un risque de sécurité nationale, même si cela est très rare y compris dans un contexte de manifestation
  5. Coup d’arrêt judiciaire au fichage des manifestants, Le Point (archive)
  6. A propos des convocations pour « audition libre », paris-luttes.info
  7. Convocations, esquivez les toutes, Défense Collective (archive)
  8. Découvrez ce qu’est une fiche S, Taranis News (archive)
  9. remplaçant désormais dans la plupart des cas l’assignation à résidence, à la suite de la loi du 30 octobre 2017 renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme

Manuel de survie en garde à vue, sur infokiosques.net

4 affaires, 7 relaxes. Retour sur les défenses du mouvement des retraites, Riposte Collective

Guide du manifestant arrêté, Par le Syndicat de la Magistrature

Défense Collective

Comment échapper aux fichiers mouchards et aux flics à l’hôpital sur paris-luttes.info