Les Forces de L’Ordre

Les Forces de L’Ordre

Comme pour toute bonne administration, le découpage des unités des forces de l’ordre est complexe et sujet à des multitudes de cas particuliers : elles seront donc ici plutôt classées selon leur rôle et désignées selon les noms employés couramment les manifestant-es.

S’il était jusque là très facile d’identifier les différentes unités via les couleurs de leur casque, l’arrivée progressive de nouveau matériel (notamment des « casque tactiques » entièrement noirs) rend la chose plus compliquée : il faudra alors se référer aux inscriptions sur leurs tenue et matériel.

Types

Unités de contrôle de foules, alias « les CRS »

Description : Ces unités, généralement appelées par abus de langage « CRS », servent à contrôler une foule à échelle globale. elles sont reconnaissables à leur armure lourde complète, à laquelle s’ajoute généralement un bouclier.

 

Stratégies : Elles appliquent une doctrine inspirée des travaux de Gustave Le Bon sur la psychologie des foules🡕, qui considère une foule comme une entité à part entière, et non comme une somme d’individus. De fait, tout est fait pour la pacifier (pour la rendre statique) ou au contraire l’agiter (pour la rendre plus volatile).

Elles ne procèdent que peu à des arrestations du fait de leur faible mobilité liée à leur équipement lourd. Elle jouent généralement le rôle de murs mobiles ; lorsqu’elles procèdent à des charges, celles-ci se limitent généralement à moins de 70 mètres et servent à provoquer des mouvements de foule pour rapidement déplacer un groupe vers un endroit donné, ou le disperser. Parce qu’elles doivent à tout prix tenir leur position jusqu’à nouvel ordre, elles forment des lignes qui prennent la plupart du temps appui sur des points particuliers, physiques ou non, dans le but notamment d’empêcher une attaque par le flanc. Ces points peuvent aller de l’angle de mur (les charges ayant d’ailleurs couramment lieu sur un bloc de quartier), à un point virtuel correspondant à la disposition de la foule et des autres unités, en passant par un kiosque à journaux, un arrêt de métro, un arbre, etc. Afin de forcer un déplacement ou la dispersion d’un groupe, elles peuvent également employer des gaz lacrymogènes, sous forme de gazeuses manuelles et de grenades à main ou propulsées par des lanceurs. Certains membres des rangs ont un rôle particulier, comme celui de médic (reconnaissable à une petite croix noire sur le torse), de surveillance (avec une caméra commerciale, allant de la GoPro sur perche à la caméra HD) ou de support (disposant d’un sac avec des munitions). Il arrive que les lignes prennent le risque de traverser la foule en plein milieu, et ce de manière répétée : cela a généralement pour but d’empêcher un attroupement trop massif, notamment sur une grande place.

Équipement : en plus des dispositifs lacrymogènes (gazeuses, grenades et lanceurs) et du bouclier déjà évoqués, elles peuvent disposer d’un tonfa, de LBD40s et de Lanceurs MultiCoups. En terme de véhicules, les CRS disposent de camions (transport, QG/atelier), équipables de grilles anti-émeutes transportées sur des remorques, et de camions canons à eaux.

Conseils : restez à bonne distance des lignes et restez à l’affût de leur mouvement. Sauf situation risquée, ces unités peuvent facilement être évitées. En cas de charge, trottinez jusqu’à être hors de portée. Dans le cas où elles provoquent un mouvement de foule inutile (par exemple en feignant un début de charge), tentez de rappeler aux personnes environnantes de ne pas paniquer et de rester calmes. Si la foule est proche des lignes, restez en retrait, préparez vous à extraire des personnes risquant de se faire gazer ou matraquer et surveiller les mouvements des CRS (chef faisant le tour des unités, talkie, sortie de matériel, etc).

Dans les faits Plusieurs groupes sont généralement sous le nom parasol de « CRS » :

  • Les Compagnies Républicaines de Sécurité (CRS)

Corps spécialisé de la police nationale : reconnaissables à leurs bandes jaunes sur le casque et leurs véhicules blanc à bandes bleues sérigraphiés du blason « CRS ». Ces unités sont généralement assez aggressive car habituées à ce genre de situation. Les numéros (1A, 2A, 2B, 2C,…) qu’elles portent dans le dos correspondent à des groupes tactiques🡕 : l’important à retenir étant que celles portant un *C appartiennent au groupe de commandement.

  • Compagnies de Sécurisation et d’Intervention/Compagnies Départementales d’Intervention (CSI/CDI, alias « les préfeux »)

Appartenant à la Police Nationale[1] et reconnaissables à leur bandes bleues sur le casque et en armure complète (à contrario de la BAC), il s’agit le plus souvent (notamment en province) de la CDI, la CSI intervenant généralement sur le grand banditisme et en Île de France. Ces unités sont généralement un peu moins expérimentées que les CRS, mais cela les rend (relativement) dangereuses du fait de leur aspect imprévisible.

  • Les Gendarmes Mobiles (« GM »)
 

Facilement reconnaissables de part leurs casques entièrement bleu « gendarmerie » et leurs camions aux mêmes couleurs, les Gendarmes Mobiles sont rattachés à l’armée. Ces unités sont parfois déployées en OPEX sur des terrains étrangers et sont donc généralement assez calmes lors des manifestations en france, quoique cela ne soit pas systématique. Comme leur nom l’indique, les gendarmes mobiles peuvent être déployées n’importe où en France : de fait, il n’est pas rares qu’ils aient à se fier à des cartes où à leur hiérarchie pour se retrouver dans une ville. La gendarmerie mobile possède des blindées, parfois déployés lors des manifestations.

Unités d’assaut, alias « les bacqueux »

Description : Ces unités se distinguent des précédentes par leur tenue, généralement plus « sport » : si elles portent des casques, un plastron léger et parfois un petit bouclier, elles portent aussi souvent des baskets de ville, ainsi qu’un jean et un sweat à capuche ou t-shirt selon le temps.

Stratégies : Même si elles participent souvent au dispositif de contrôle des foules en faisant des lignes, leur but principal est de procéder à des arrestations : elles sont de fait très mobiles et très agiles. À contrario des unités de contrôle de foule, leurs charges peuvent s’étendre sur de grande distance au point d’être assimilées à des chasses à l’homme. À cela s’ajoute une extrème violence lors des interpellations (coups de matraque téléscopique, de genoux dans le visage, etc), et ce dans le but de neutraliser le plus rapidement la cible. Hors manifestations, ces unités sont découpées en équipages de 2 à 5 personnes, repartie selon les véhicules. En manifestation, elles peuvent se présenter sous la forme d’un simple équipage mais aussi sous la forme de plusieurs dizaines d’individus. De part leur mobilité et leur violence, ces unités sont à surveiller de très près. Il n’est pas rare que les bacqueux tente de provoquer la foule verbalement ou physiquement.

Équipement : en plus du plastron de base, de la matraque téléscopique et de petits boucliers, elles peuvent disposer d’armes semi-létales classiques comme le LBD40, le TASER, et plus rarement de nos jours le Flashball. Ces unités se déplacent généralement en voitures et fourgonettes banalisées, souvent les mêmes modèles.

Conseils : restez à bonne distance de ces unités, qui pourraient soudainement recevoir l’ordre de vous interpeler. Surveillez leur mouvement et concertez vous avec vos camarades quant à leur but à instant donné. Ne vous isolez pas de la foule et de vos camarades. Dans le cas où elles tentent de provoquer les personnes, ne céder pas à l’envie de répondre et restez calmes.

Dans les faits : Ces unités sont à juste titre qualifiées de « bacqueux », dans la mesure où il s’agit la plupart du temps de membres de la Brigade Anti Criminalité. Quelques cas particuliers néanmoins :

  • Les voltigeurs : bien que « le Peloton de Voltigeurs Motoporté » ait été dissout suite à l’Affaire Malik Oussekine [2], le mode d’action des voltigeurs a fait son grand retour durant les gilets jaunes de part le DAR et le BRAV-M. Différence notable néanmoins, l’équipier situé à l’arrière n’a plus une matraque en main mais plus souvent un LBD, augmentant d’autant plus leur rayon d’action. Si le Détachements d’Action Rapide (ou DAR)[3] n’a existé que brièvement, la Brigade de Répression de l’Action Violente (BRAV) elle est toujours d’actualité. Ce groupement constitué sur le moment et issus majoritairement de la BAC a pour but d’aller au contact direct des manifestant-es afin de procéder à des arrestations, là où la BAC reste généralement dans le dispositif et interpelle en marge des rassemblements. Parce qu’ils constituent les éléments les plus violents de la BAC, ils sont d’autant plus dangereux que les bacqueux. Là où le DAR était peu reconnaissable de la BAC, la BRAV est reconnaissable par leurs casques de moto blancs.

  • Peloton de surveillance et d’intervention de la Gendarmerie (PSIG) et la Brigade de recherche et d’intervention (BRI) : parfois confondues avec la BAC de part leur équipement fait pour le déplacement rapide, ces unités sont rarement déployées lors de manifestations, leur but originel étant le grand banditisme ou la lutte antigang. Ces unités ressemblent à des membres du SWAT américain (tenue entièrement noire, armes automatiques, etc). De part leur faible présence, leurs stratégies sont très peu connues mais sont généralement en soutien du reste du dispositif, via des tireurs d’élites par exemple. Une spécificité importante à savoir, ces unités ne rentrent généralement pas dans le cadre du droit de filmer les forces de l’ordre, du fait de leur rôle habituel[4]. Enfin, il arrive parfois que le RAID (« Recherche, assistance, intervention, dissuasion ») soit déployé lors d’opérations de saisies ou d’expulsion de squats[5].

     

Unités de surveillance, alias « les RGs »

Ceux que l’on surnomme par abus de langage les « RG&quot[6]; (Renseignements Généraux) ont deux missions principales : premièrement, faire remonter des renseignements issus du terrain aux autorités afin de leur permettre d’avoir une vision d’ensemble sur les mouvements revendicatifs. Secondement, ils ont pour rôle d’identifier les éléments qu’ils jugent à interpeler et à transmettre l’information aux unités d’intevention sur le terrain. Toujours par abus de langage, sont également désignés comme tels les membres de la Direction Générale de la Sécurité Intérieure (DGSI), à l’origine des fiches S. Il y a peu d’informations publiques quant au chevauchement entre ces différentes sources de renseignement.

Description : il est facile de répérer les RGs quand on sait à quoi ils ressemblent, mais difficile de les décrire pour l’oeil non entrainé. La meilleure description que l’on puisse donner est généralement celle d’hommes dans la cinquantaine, en baskets-jeans avec une veste banale, et l’air de perpétuellement chercher leurs gosses. Cette description n’est pas absolue néanmoins : il s’agit parfois de femmes, parfois de plus jeunes mieux déguisés, ou inversement parfois ne se cachent même pas et s’affichent avec leur talkies ou téléphones portables. Les RGs sont souvent toujours les mêmes déployés dans la même ville, il est donc possible sous couvert d’une bonne mémoire des visages de facilement les repérer.

Stratégies : ces éléments s’infiltrent en civil dans la foule, observent et écoutent simplement autour d’eux. En conjonction avec l’hélicoptère, ils ont pour but de construire un trombinoscope des éléments susceptibles d’être interpelés. Si un-e individu-e est sous surveillance intensive (car connus des services de renseignement, ou agissant de manière suspecte), les RGs peuvent aller jusqu’à retracer l’entierté de son parcours[7] dans la manifestation, incluant ses changements de vêtements.

Équipement : à peu de chose près, aucun. Possiblement une arme de poing en cas d’urgence.

Conseils : si vous pensez avoir repéré un RG, il est déconseillé d’engager un contact (même verbal) : il est déjà arrivé que des personnes passent devant le tribunal pour un prétendu appel à lynchage pour les avoir signalés. Il est préférable de l’indiquer discrètement à vos camarades à portée, d’en discuter, et dans le doute d’éviter toute action ou parole potentiellement répréhensible, le temps de s’éloigner. Il n’est pas rare qu’il suivent les médics, partant du principe que les médics possèdent des informations sur l’organisation de la manif (ce qui est généralement faux). Attention également au badeaux qui viennent vous poser beaucoup de questions suite à un blessé : il peut s’agir d’un RG.

Dans les faits : Les « Renseignement Généraux » ont disparu au profit de la DCRI suite à la fusion avec la Direction de la Surveillance du Territoire en 2008[8], mais le terme est resté. Deux types d’unités ressortent principalement, rarement distingables visuellement sur le terrain :

  • La Cellule d’Identification des Violences Urbaines (CIVU)

    Ces unités font partie de la CSI, évoquée plus haut. C’est eux qui construisent les trombinoscopes et apportent des preuves des méfaits en conjonction avec l’hélicoptère.

  • Les Renseignements Territoriaux

    à contrario des membres de la CIVU, leur rôle est plus d’observer les mouvements sociaux et revendicatifs de l’intérieur afin d’apporter une meilleure compréhension de ceux-ci aux autorités. Ils sont rattachés à la Direction Centrale de la Sécurité Publique (DCSP), appartenant à la police nationale.

Leurs armes et équipements

Se référer à la page Armes et équipements des Forces de L’Ordre

Dispositif & Stratégies

Schéma de l'iontervention graduée des Forces de l'ordre, peu compréhensible

 

Leur but étant de contrôler voire disperser une foule, leur arme commune première est la peur, utilisée de différentes façons selon les cas de figure et les unités. Il ne s’agit pas là d’une dénonciation politique quelconque mais un fait clairement affiché : les forces de l’ordre profitent du fait qu’une foule sous tension est beaucoup plus désorganisée et volatile. Cela passe par leur apparence (même si cela est plus un but secondaire, leurs comportement, notamment par exemple en frappant avec les tonfas sur les boucliers lorsqu’une ligne avance, jusqu’aux spots et sirènes sur les canons à eaux.

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Notes et références

  1. Les Compagnies Départementale d’Intervention, et de Sécurisation (CDI, CSI), police-nationale.net
  2. Affaire Malik Oussekine, Wikipedia
  3. « Détachement d’Action Rapide » : La brigade de choc qui casse les luttes, Nantes Révoltée (Facebook)
  4. circulaire n°2008-8433 (archive)
  5. A Rennes, le Raid plane sur la Maison du peuple, Libération
  6. Renseignements généraux et violences urbaines, Laurent Bonelli
  7. Acte 13 des Gilets jaunes : itinéraire d’un casseur dans les rues de Paris, Le Parisien

Décret n° 2008-609 du 27 juin 2008, Légifrance

Les RG réapparaissent, six ans après leur disparition, France Info