Se placer et se déplacer

Se placer et se déplacer

Lors de manifestations et autres événements collectifs, se (dé)placer correctement est absolument essentiel pour éviter de se mettre en danger inutilement tout en étant au plus près de l’action. Cela est d’autant plus important lorsque l’on tient un rôle de support (sécurité, soins, etc) pour les autres personnes.

Observer son environnement

Pour cela, il est indispensable de bien regarder et écouter autour de soi : le placement des autres groupes, des forces de l’ordre, ainsi que la disposition de l’environnement.

Au cas où vous devriez vous mettre à l’abris mais qu’une fuite immédiate n’est pas possible (par exemple si vous avec une personne blessée), repérez systématiquement les lieux de replis. Gardez en tête les corridors, les halls d’immeuble ouverts (ou dont vous connaissez le code d’une manière ou d’une autre), les restaurants et magasins qui n’ont pas l’air de fermer leur grille, etc.

Quand ça pète, pensez bien à garder un œil vers le ciel, notamment quand vous entendez le bruit caractéristiques des lanceurs de grenade des flics. Cela vous permet d’anticiper où ça peut tomber, prévenir vos camarades, et potentiellement savoir ce qui tombe (gaz vs grenade GM2L).

Les forces de l’ordre

Avant toute chose, il est critique de savoir différencier les unités de « contrôle de foule » (alias les CRS) des unités plus spécialisées dans les interpellations comme la BAC ou la BRAV-M : leur positionnements respectifs peuvent éventuellement permettre de deviner ce qu’ils vont faire et donc de prévoir en conséquence. Aussi ératique que puisse paraitre leur comportement, les flics agissent généralement selon des stratégies bien définies pour atteindre leurs objectifs. [1]. Par exemple, une charge de « CRS » dépasse rarement les 70m, il est donc inutile de courir plus loin, et il est préférable de simplement trottiner tout en s’assurant que personne n’est laissé derrière, ce qui pourrait mener à une arrestation.

Connaitre leurs armes est également essentiel : par exemple, les gaz lacrymogènes sont généralement assez localisés bien définis : il suffit de se déplacer de quelques dizaines de mètres pour les éviter. Inversement, les flics utilisent souvent les canons à eau en sous-puissance pour laisser croire aux gens qu’il est possible de se rapprocher, avant de remettre la puissance à fond. Ne vous fiez donc pas à la distance apparente d’un jet à un instant donné pour savoir la distance de sécurité.

Se placer…

Lors d’une manifestation, il faut toujours se positionner face au danger. On tourne donc le dos à la foule, et on surveille les mouvements des forces de l’ordre pour anticiper leur action (charge, gazage, nasse…). Évitez de crier ou de courir inutilement, cela augmente le stress collectif.

Dans la plupart des cas, les murs sont vos meilleurs amis. Il permettent de limiter les directions à surveiller. à moins d’être une cible potentiel d’arrestation, coller les murs peut permettre de passer à travers une charge imminente. Il ne s’agit pas en revanche de se coincer : gardez toujours en tête la direction dans laquelle vous pouvez fuir au besoin. Il ne s’agit pas non plus de rester statique : utilisez les murs comme un appui et non comme un campement.

De la même manière, selon l’origine du danger, les coins des bâtiments peuvent vous permettre de garder un œil sur la situation sans trop vous exposer. Il n’est pas rare qu’une manif ou un groupe tienne position face à une menace située dans une rue parallèle, notamment avec une banderole.

Pensez à vous repartir des rôles, par exemple (figure 1) :

  • (1) Une personne surveille les adversaires
  • (2) Une personne (ou plus) surveille les personnes susceptibles d’être blessées
figure 1
figure 2

Généralement, les équipes de medics se placent le long des cortèges, légèrement en retrait de l’avant (figure 2 (1)). Cela permet d’être prêt à plonger en cas de blesséx. Mais selon votre expérience, votre positionnement et votre but, les groupes « défensifs » tels que les black-blocs offrent souvent une meilleure protection que leurs alentours. N’hésitez donc pas à les intégrer (figure 2 (2)), tout en ayant en tête que le principe de ces groupes est d’encaisser les dangers (physiques ou légaux) plus que de les éviter. Si il y a assez d’équipes et différentes stratégies, les deux positions peuvent se compléter.

figure 3

Dans certains contextes comme lors d’une attaque contre un cortèges, certains groupes forment des « lignes » (défensives ou offensives, selon le danger). C’est une pratique répandue notamment dans les Services d’Ordre syndicaux et certains groupes antifascistes. En théorie, elles prennent la forme de deux lignes : une servant à défendre (les bras croisés derrière le corps par exemple) ou attaquer (tout le monde en position de garde de boxe), et une autre servant de support et de guides en cas de déplacement. Dans la pratique, ces lignes sont souvent plus fluides du fait du contexte hasardeux. Le principe est simple, si quelqu’un en première ligne est blessé, la ou les personnes en seconde ligne la remplace, comme les dents d’un requins. Dans ce genre de cas, le mieux pour les médics est de se placer en « troisième ligne » (figure 3), prêtxs à réceptionner les personnes blessées.

si vous êtes dans la portée effective d’un LBD (ou d’un lanceur près à faire un tir tendu), mettez vos épaules de biais dans l’alignement de celui-ci pour limiter votre taille apparente et donc vous rendre plus difficilement visable. Pensez également à protéger vos mains en les mettant dans le dos ou à l’opposée du tireur.

figure 4

Faites extrêmement attention à ne pas vous retrouver entre la manif et les adversaires potentiels : vous êtes pas des boucliers humains, et vous aurez du mal à soigner si vous êtes vous mêmes blesséxs (figure 4)

De manière générale, la stratégie appliquée par les forces de l’ordre est tout aussi applicable pour vous : n’hésitez pas à prendre « appui » sur un poteau, un abris bus, un panneau publicitaire… Pour vous en servir de pivot et également vous offrir un couloir de fuite à l’opposée de la source de danger.

… Et se déplacer

Un conseils d’apparence simple mais qui doit être appliqué de manière systématique pour réellement être utile est de toujours garder en tête une sortie : il faut à tout moment savoir quelle est la meilleure direction pour fuir, et que cette informations soit connu par l’entièreté de votre groupe pour éviter un quiproquo au pire des moments.

figure 5

Lorsque vous vous déplacer dans une foule dense : gardez dans la mesure du possible les épaules dans la direction où vous allez, ne regardez pas les gens dans les yeux mais bien du côté où vous souhaitez passer, et gardez une vitesse constante : cela aide les gens à prédire votre parcours. Lorsque vous êtes en groupe, n’hésitez pas à former des « colonnes » (figure 5.a) en attrapant le sac à dos de la personne devant (non sans l’avertir). Cela évite que le groupe soit séparé. Néanmoins, évitez de faire ces colonnes sans raison : vous aurez l’air de mascus ridicules ou vous risquez de faire peur au gens (figure 5.b)

Si vous n’êtes pas au clair sur la direction potentiel du danger et/ou de la fuite, vous pouvez attraper votre binôme par le bras en étant chacun dans une direction (on appelle ça faire un avant-arrière) : cela permet par exemple de reculer à la suite d’un reflux d’une manifestation, en gardant un œil sur la situation qui a engendré le reflux tout en laissant votre binôme vous guider en reculant.

Le périmètre

figure 6

Lors de la gestion d’une personne blessée, vous aurez potentiellement besoin de protéger la personne et vos camarades. Ça passe par un périmètre (figure 6), composé de personnes lambdas ou medics passant par là, qui encerclent votre équipe, le dos tourné à vous pour faire face aux dangers potentiels. Parce que les personnes qui aident ne savent pas nécessairement comme faire, il faudra potentiellement une personne en charge de guider ces personnes.

Encore une fois dans ce genre de cas, le mieux est de s’attribuer des rôles. Par exemple :

  • Une personne s’occupe des soins (figure 6 (1))
  • Une personne assiste (sort le matos, gestion psy, etc) (figure 6 (2))
  • Une personne gère le périmètre de protection (figure 6 (3))

Pratiquer

Il y a deux moyens de se former à ce genre de tactiques : le premier plutôt frontal est l’expérience sur le terrain. Mais si vous souhaitez vous initiez ou réviser ces stratégies de déplacement, il existe un peu partout des formations dites de « déplacements collectifs ». N’hésitez pas à vous renseigner sur les formations près de chez vous.

Notes et références

  1. Plus d’informations dans Les Forces de L’Ordre